1961 à 1964 - Le banc d'Arguin s'épuise

 

Situation de la pêche à la langouste rose

C'est de 1961 à 1963 qu'ont été débarquées à Camaret les plus grandes quantités de langoustes roses. L'année 1961 a vu une forte progression par rapport à l'année précédente avec plus de 750 tonnes débarquées, cette quantité n'a jamais été égalée par la suite.
Les années 1962 et 1963 ont été en léger recul, mais au dessus de 700 tonnes.
Les résultats globaux n'évoluaient plus alors que le nombre de bateaux était en augmentation.
Comme le Banc d'Arguin ne produisait plus suffisamment, dès 1961 l'ensemble de la profession s'organisa pour essayer de trouver de nouvelles zones pêche. Des prospections lointaines furent programmées par les douarnenistes et les camarétois vers les côtes africaines, sud-américaines (Brésil) et aussi vers l'Amérique du nord (Terre-Neuve).

Evolution des apports de langoustes roses à Camaret de 1955 à 1963.>

 

 

La construction de nouveaux grands langoustiers continue.

La pêche montrait un début de déclin mais la construction des navires continuait et les chantiers avaient des carnets de commande bien remplis. C'est ainsi qu'en 1961 on lança 5 nouveaux langoustiers puis 2 en 1962 , 4 en 1963 et 3 en 1964, ce qui portait la flottille à 23 navires en 1964.

  • Bateaux construits en 1961
  • Bateaux construits en 1962
  • Bateaux construits en 1963
  • Bateaux construits en 1964
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    Le temps des prospections...

    Antilles Terre-neuve Mauritanie Cap Vert Bresil Golfe de Guinée Açores

     

    1961-1962-1963 : Brésil - Guerre de la langouste.

    Voir la page consacrée au Brésil

    Mai 1961: Le Folgor part en exploration pour Terre-Neuve

    le Folgor (patron Lucien Drévillon - Armement Bossennec) partait lui aussi de Camaret pour une traversée de l'Atlantique pour des mers plus froides. Cap sur l'Amérique du nord, sur l'archipel de St Pierre et Miquelon pour aller prospecter les fonds à homards du French-Shore.

    Folgor
    Le Folgor rentre au port de Camaret
    L'expédition, prévue pour une durée de deux mois et demi, était financée par le fonds du plan de relance des industries de la pêche.
    Le 9 mai 1961 le Folgor quittait son port d'attache. Après une traversée mouvementée il arrivait à St Pierre et Miquelon le 21 mai, retardé par un très mauvais temps et une vague de froid qui prolongeait l'hiver.
    Le Folgor ne fut pas autorisé à pêcher des homards dans les zones fréquentées par les canadiens, du moins dans les eaux favorables à cette pêche, le langoustier quitta donc Terre-Neuve.
    Sur le chemin du retour il fit quelques recherches pour explorer le Banc Chaucer, situé dans le nord des Açores où quelques années plus tôt deux langoustiers camaretois avaient trouvé de la langouste mais avaient du quitter précipitamment l'endroit car ils étaient entrés dans les eaux territoriales. La recherche (hors des eaux territoriales) fut sans résultat et le Folgor rentra à Camaret avec un vivier pratiquement vide.

     

    Décembre 1961 : 4 langoustiers camarétois se dirigent vers les îles du Cap Vert.

    Quatre langoustiers camaretois, Ma Petite Folie, le Toulinguet (qui faisait sa première campagne) et le tandem Kador et Emigrant (un grand langoustier et un plus petit de 40 tx associés pour la pêche) qui travaillaient sur le Banc d'Arguin, lassés d'une pêche médiocre, décidèrent d'aller voir plus au sud et se lancèrent dans une prospection du secteur des îles du cap Vert, mais les résultats ne furent pas concluants.

     

    Février 1962 : le "St Rioc" en mer des Caraïbes.

    Antilles
    Du 26 février 1962 au 22 juin 1962 Le Saint Rioc fait un voyage de prospection aux Antilles.

    Dans le cadre du plan de relance des pêches, le Saint Rioc avait été choisi par le comité interprofessionnel des pêches pour faire une campagne de 4 mois de prospection aux Antilles .
    Le 26 février 1962, le Saint Rioc, patron Louis Le Guen et son équipage, quittaient Camaret. Après une escale aux Açores (Ponta Delgada – île San Miguel) ils arrivaient en Guadeloupe après 25 jours de traversée.

    Equipage St Rioc
    Equipage du st Rioc (col. Albert Lallonder)
    Le 27 mars ils partirent de "La Désirade" pour un grand périple vers l'ouest (voir carte), explorant les fonds supposés favorables. Pour la prospection ils avaient apporté des casiers et aussi des filets à langoustes qu'ils utilisaient chaque jour, répertoriant systématiquement le nombre de prises et la position géographique.
    Le 1er juin, après avoir fait le plein de gaz-oil à San Juan, le St Rioc mettait le cap sur la France et arrivait à Camaret 21 jours plus tard.

    Les conclusions furent qu'une exploitation serait peut être possible sur le "grand banc des Mosquitos" exploré en fin de prospection. Plusieurs bateaux de Camaret (Veryac'h) et Douarnenez y revinrent par la suite et le confirmèrent.

     

    Juillet 1962 : prospection aux Açores par 4 petits langoustiers

    En juillet 4 langoustiers classiques, Santa Familia (Simon Vigouroux), N.D des Neiges (Charles Mazet) et Amour du Marin (Joseph Mélenec) signalaient avoir prospecté le sud des Açores, puis le banc Chaucer (nord des Açores) sans succès.

     

    Juillet 1963 : Le Toulinguet prospecte dans le golfe de Guinée

    Toulinguet
    Le Toulinguet

    Le Toulinguet avait participé à la campagne du Brésil en début d'année. Chassé par les brésiliens il avait fini sa campagne sur le banc d'Arguin et était rentré à Camaret fin mai avec 11 tonnes de langoustes roses.
    Choisi, ainsi que le Gotte (mauritanien douarneniste) par le comité des pêches pour une mission de prospection langoustière dans le golfe de Guinée, une campagne financée par le fonds de relance des pêches maritimes, il quittait Camaret le 2 juillet 1963.
    La mission consistait à faire une estimation des possibilités de pêche dans une zone comprise entre le Cap des Palmes et l'île des Princes
    Pendant les 60 jours prévus par le contrat les deux bateaux cherchèrent en vain la langouste, il n'y en avait pas ou très peu. Le 28 septembre le Toulinguet rentrait à Dakar et rendait son rapport.
    Cette expédition fut un échec.

     

    Aout 1963 : Campagne du Veryac'h aux Antilles

    Le Veryac'h, patron Jo Dinahet et son équipage, étaient rentrés début février de Mauritanie. Après quelques semaines passées à Camaret, au début du mois de mars, ils faisaint à nouveau route vers la Mauritanie quand ils reçurent l'ordre de l'armement de mettre le cap sur le Honduras. Après avoir fait le plein de gaz-oil à Dakar ils mirent le cap sur la mer des Caraïbes où il capturèrent environ 30 000 langoustes vivantes conservées en vivier et 4.5 tonnes de queues congelées. Mais le voyage fut long et la cargaison subit une forte mortalité car les langoustes se dévoraient entre elles. A l'arrivée à Camaret fin juillet il n'en restait que 8000 commercialisables soit 5.5 tonnes, 10 tonnes furent perdues pendant le voyage.

     

    Février 1964 : La Barbade prospecte dans le Golfe de Guinée

    En février 1964 La Barbade a effectué une prospection de 2 mois (parti le 13 septembre) c’est un échec, il s'est ensuite rendu en Mauritanie et a décharge 18 tonnes .

     

    Des naufrages

    Avril 1962 : Le terrible drame du Kador.

    Le Kador était une unité en acier de l'armement Heise-Kermel lancée en août 1959 au chantier "La Perrière" à Lorient-Keroman. C''était un langoustier-congélateur, il n'avait pas de vivier.
    Le bateau avait quitté Camaret le samedi 14 avril 1959 pour se rendre sur le Banc d'Arguin au large de la Mauritanie puis dans les eaux brésiliennes.
    Le 18 avril à 13 heures (GMT) le chalutier espagnol Artadi signalait par radio avoir aperçu un langoustier chaviré, quille en l'air, entre Brest et cap Finisterre à la hauteur de St-Nazaire.
    L'épave fut bientôt identifée comme étant celle du Kador.
    Aucun des 12 membres d'équipage n'était visible et dans les parages aucune trace de la présence d'un radeau ou de naufragés.
    Rapidement des recherches sur mer et aériennes furent déclenchées par la marine nationale pour tenter de retrouver d'éventuels naufragés, plusieurs bateaux et 3 avions furent mobilisés mais sans succès.
    A Morgat et à Camaret c'était la stupéfaction, comment un tel drame avait-il pu se produire ?

    Kador
    Le Kador

    L'épave du langoustier fut remorquée par trois chalutiers espagnols en direction de Bilbao, nul ne savait ce qu'elle pouvait encore contenir, peut-être y avait-il des survivants dans une poche d'air. L'attente fut interminable pour les familles, le convoi évoluait à 2 noeuds (3.6 km/h) avec de nombreuses difficultés, le langoustier risquait de couler à tout moment. Le remorquage dura 5 jours, et à l'arrivée devant Bilbao, le 23 avril seule la proue sortait de l'eau, il fallut redresser l'épave et la vider pour pouvoir entrer au port.
    Le 27 avril le convoi pouvait enfin entrer à Bilbao. Dans l'épave on trouva un corps, celui de Jean Moulin, aucun des onze autres marins du Kador ne fut retrouvé.
    Depuis le début de la pêche en Mauritanie un tel naufrage causant autant de victimes ne s'était produit dans le quartier maritime et il fallait remonter à 1947 pour retrouver un tel drame avec le naufrage de l'Indifférent, éperonné par un cargo anglais, causant lui aussi la perte de 12 vies humaines.

    Le langoustier Monseigneur Landreau, qui avait quitté Camaret 24 h avant le Kador, avait rencontré un fort coup de vent qui lui avait arraché 6 mètres de pavois (partie du bordé qui se trouve plus haut que le pont du bateau).

    Novembre 1963 : Naufrage du Trezic

    Le 24 novembre 1963 le Trézic fait naufrage à l'entrée du port de l'île St Vincent du Cap vert. Aucune victime. L'armateur et le constructeur (Auguste Tertu) venus sur place ne purent que constater le drame, le bateau s'était disloqué sur les rochers.

    Juin 1964 : Perte du Constellation.

    La nuit du 17 au 18 juin 1964 le langoustier "Constellation" , qui faisait route vers Port Etienne (Nouadhibou) pour récupérer un matelot malade, s'échoua sur un banc de sable au nord du feu de la Guerra. Il n'y eu aucune victime. Malgré la présence de deux remorqueurs il fut impossible de récupérer le bateau.

     

    Situation en fin d'année 1964

    Le Banc d'Arguin continuait à se dépeupler et ne suffisait plus à assurer la rentabilité des 23 langoustiers camarétois. Les campagnes de pêche duraient 4 ou 5 mois et rapportaient de moins en moins de langoustes. Parfois les bateaux complétaient leur campagne en allant au Maroc, au Portugal ou en Méditerranée pêcher de la langouste rouge ou du homard.
    Aucune des voies explorées dans les diverses prospections n'avaient apporté de solution viable à l'épuisement des fonds mauritaniens.