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Les débuts de pêche à la langouste rouge

D'abord en mer d'Iroise

Nous avons vu dit plus haut qu'à la fin 19eme siècle Camaret était un port essentiellement sardinier, mais il y avait aussi une petite flottille langoustière qui pêchait au casier les langoustes et homards de la mer d'Iroise. Ce type de pêche existait depuis de nombreuses années mais restait marginal par rapport à la pêche sardinière qui, avec les conserveries, s'était industrialisée dès 1870.

Le cabotage des langoustes

Il existait aussi un commerce langoustier avec l'Espagne, Denis Provos, s'était établi depuis 1877, Le mareyeur Denis Provost

1877 Denis Provost vend son « Sanson » et achète « La Louise »à Fécamps (62 tx) , c’est un ancien harenguier, il fait ajouter un vivier par les chantiers de Camaret.  (AV2p14). Il installe un un comptoir à Vigo et fera le commerce des langoustes avec l’Espagne

La pêche en Iroise

(Voir Dupuy pour le début) jusquen 1898

Langouste rouge
La langouste rouge vit sur des fonds rocheux. La mer d'Iroise est propice à son développement.

La langouste rouge se pêchait généralement au casier, parfois aussi au filet de raie, sur des fonds rocheux souvent accidentés. La mer d'Iroise etait propice à son développement.
On pouvait trouver de la langouste dans le secteur des Tas de Pois, au large du Toulinguet et sur toutes les chaines rocheuses que compte l'Iroise.

Vers 1895 Camaret comptait entre 60 et 70 bateaux langoustiers pour une centaine de sardiniers. Certains de ces bateaux pratiquaient les deux métiers, sardines ou langoustes, suivant la saison ou les caprices de la sardine. D'autres, qui pêchaient la raie aux filets à grandes mailles pouvaient aussi ramener de la langouste.
Les bateaux sardiniers ou langoustiers n'étaient pas très différents, seul l'aménagement de l'espace de travail les différenciait.

Au cours des années la langouste se fit plus rare, les abords de la presqu'île ne suffisaient plus, il fallait aller plus loin. L'Ile de Sein et sa dangereuse chaussée devinrent une des principales zones le pêche.

Dans cette zone la concurrence était forte avec les autres ports, Sein, Audierne, Molène, le Conquet, Douarnenez, et aussi certains ports du nord Finistère comme Paimpol. Tous parcouraient l'Iroise à la recherche de la langouste rouge.
Peu à peu, la ressource commença à diminuer.

La presse locale de 1896 rapportait dèjà que les petits langoustiers qui voulaient réussir devaient dépasser l'Iroise, Sein ne donnait plus assez, il fallait franchir le Raz, aller sur les côtes du sud Finistère, du côté de Beg Meil pour trouver de nouvelles bases de pêche. Qui dit Beg Meil dit "Les Glénans". Les camaretois firent voile vers les Glénans.

Le journal "Le Finistère" écrivait, le 16 mai 1896

Voilà la morte-eau terminée. Tous nos bateaux sont rentrés le 9 de l'île-de-Sein. Comme cela arrive presque toujours, il y a de grandes différences entre les gains de chaque bateau. Certains équipages n'ont reçu que 12 fr par homme, tandis que la part de chacun a atteint, chez d'autres, 70 à 80 fr. La moyenne est d'environ 30 fr. On a perdu peu d'engins ; mais que de peine on a eu et quels dangers on a affrontés! Il ne s'agit plus aujourd'hui de rester près des côtes.

Quiconque veut gagner le pain de sa famille doit aller faire connaissance avec les marées de Beg-Meil.
C'est de rigueur pour nos marins de Camaret. Celui qui va le plus loin est presque assuré de faire la meilleure pêche. Nos pêcheurs cherchent l'un l'autre à se devancer. Car, tandis que celui qui est resté proche de terre n'a rien pris, de plus audacieux ont trouvé jusqu'à douze langoustes dans le même casier.
Les langoustes se vendent 21 fr, la douzaine.

Mais pour aller plus loin il fallait des bateaux plus forts et plus manoeuvrants. Les chaloupes sardinières, avec leur deux mâts, n'étaient pas adaptées à ce métier où il fallait sans cesse virer de bord pour attraper les bouées ou mettre les casiers à l'eau.
Le gréement de sloop commença à s'imposer.
Avec son mât unique et ses voiles d'avant foc et trinquette il était beaucoup plus maniable.

chaloupe-sloop
Cette photo montre à gauche la chaloupe C851 équipée de casiers à langoustes, et à droite le sloop C 689, un sloop langoustier.

La photo de droite, prise vers 1900, montre les deux types de bateaux, une chaloupe et un sloop. Tous deux construits à Camaret en 1898. A gauche, la chaloupe C851 "Joséphine" de Thomas Kerdreux, à bord de laquelle on peut voir quelques casiers à langoustes, et le sloop C889 "Clocher du Village" appuyé au quai, qui a aussi des casiers.
Ces deux types bateaux ont pratiqué la pêche langoustière mais le seul le sloop restera le bateau des langoustiers...

Comme relaté dans l'article du journal "Le Finistère", les pêcheurs cherchaient à se devancer pour trouver les meilleurs lieux de pêche.

En 1898, Toussaint Le Garrec patron pêcheur langoustier, trés entreprenant, avait fait construire dans un chantier de Camaret un nouveau sloop à vivier de près de 10 mètres jaugeant 8.48 tx, le Marcel Eléonore, lancé en mars de cette même année.

Le plateau de Rochebonne

Toussaint Le Garrec avait entendu parler d'un sénan nommé Milliner qui faisait de très bonnes pêches de langoustes mais personne ne connaissait l’endroit où il allait. Le Garrec décida de le suivre discrétement. Il mit cap au sud sur la piste de Milliner. La poursuite le conduisit jusqu’à Belle Ile où Le Garrec perdit le senan de vue.

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Article de UAM d'octobre 1896.

Il en fallait plus pour décourager un patron camarétois qui vient de construire un bateau neuf. A la marée suivante il reprit discrétement la chasse qui le mena bien au sud de Belle Ile. Il du même dépasser l'Ile d'Yeu pour arriver sur le plateau de Rochebonne ou langouste abondait. Le camaretois ne tarda pas à remplir son vivier.

Pour ne pas perdre de temps en voyages, Toussaint Le Garrec vendait sa pêche au Croisic. Il pêcha beaucoup de langoustes mais semble t-il resta plutôt discret la première année.
Seulement un petit nombre de bateaux le suivirent.
Du 1er avril au 1er octobre 1898 (6 mois) il vendit pour 17 000 Francs de langoustes. Pour situer les gains, au même moment un pêcheur du Croisic avait été félicité par le ministre pour avoir pêché pour 33000 Francs de poissons en 28 mois. (lire l'article d'octobre 1898 dans l'UAM)

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De Camaret à Rochebonne.

A Camaret, cette découverte fit grand bruit. On parlait de ressources inépuisables. L'année suivante, dès la fin février une vingtaine de langoustiers à vivier se préparaient pour la campagne de Rochebonne 1899.

Durant l'année 1898, instruits par l'expérience de Toussaint le Garrec les chantiers camarétois se lancèrent dans la construction de nouveaux sloops à vivier. En début d'année 1899 ce c'était la course pour finaliser ces nouveaux navires. Il fallait être prèt pour le départ de la campagne.

Toussaint le Garrec fit construire un nouveau bateau, "La Mouette C902", Pierre Douguet "l'Explorateur C901", il y eut aussi les "Deux Frères C903", "L'Asile-du-pêcheur C905", "l'Aigle C906", "Fleur d'été" C907, "Réséda C904", "L'oiseau des mers" Tous les chantiers étaient en action pour cette nouvelle campagne..

Mais parmi ces candidats à l'aventure langoustière il n'y avait pas que des sloops flambants neufs, il y avait aussi des bateaux plus anciens, non pontés, ou demi-pontés mais prêts à affronter les 180 milles nautiques qui les séparaient des nouveaux lieux de pêche. Ces bateaux, construits pour la mer mer d’Iroise n'étaient vraiment pas adaptés pour de telles campagnes.
Sur ces nouveaux lieux de pêche il fallait affronter le mauvais temps, dormir à bord pendant plusieurs jours, manger, pouvoir transporter le matériel et la pêche, les appâts, les casiers, les orains, les bouées, c'était un nouveau métier. L'outil de travail demandait une adaptation.

Le banc de Rochebonne va fortement intéresser nos pêcheurs pendant 3 ans puis les langoustes se faisant plus rares les voyages deviendront moins rentables.

Les côtes anglaises

Les côtes anglaises